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Entreprises et Alumni

CHARLOTTE LELUC, ALUMNI ISC ET FONDATRICE DE BANDE DE CHEFFES

Charlotte (promotion 2009) a su mettre à profit ses différentes expériences dans l’humanitaire,
l’économie sociale et solidaire, et la coordination de l’accueil des personnes réfugiées pour fonder sa
propre entreprise solidaire d’utilité sociale : Bande de Cheffes. Son projet lie aussi son attrait pour la
cuisine et son inébranlable envie de faire bouger les lignes puisqu’elle a créé un service de traiteur de
qualité à destination des entreprises, qui emploie des cuisinières réfugiées et utilise des produits
respectueux de l’environnement.

L’humanitaire

Après son baccalauréat, Charlotte a une ambition professionnelle bien précise : travailler dans
l’humanitaire. Elle choisit donc de suivre un cursus en langues étrangères appliquées et en sciences
économiques, et obtient en 2001 le master Gestion de l’humanitaire de l’Université de Créteil. Après un
stage à la Croix-Rouge française, elle est embauchée au sein de l’association. Pendant sept ans, elle
alterne missions de terrain et gestion de projets depuis le siège. Au cours de cette expérience, Charlotte
mesure l’importance des leviers qu’il existe dans le rapport entre les entreprises et les associations.
« J’avais envie d’exploiter ces passerelles qui me semblaient évidentes » précise-t-elle.
Mais, pour rejoindre le secteur de la RSE, la responsabilité sociétale et environnementale des entreprises,
la jeune femme doit parfaire ses connaissances sur le sujet. Elle décide donc en 2008 d’intégrer l’ISC
Paris qui propose le master Management et performance durable. Charlotte découvre alors qu’entre le
monde associatif et les stratégies RSE parfois artificielles des entreprises, il existe un entre-deux :
l’économie sociale et solidaire. Le concept d’économie sociale et solidaire (ESS) désigne un ensemble
d’entreprises organisées sous forme de coopératives, mutuelles, associations, ou fondations, dont le
fonctionnement interne et les activités sont fondés sur un principe de solidarité et d’utilité sociale.

Les politiques publiques


Une opportunité conduit alors Charlotte à rejoindre l’administration publique centrale. Elle a pour mission
de travailler sur le thème de l’économie sociale et solidaire, encore peu connu mais que le Secrétaire
d’État Benoît Hamon souhaite cadrer et développer à travers un projet de loi. Là-bas, notre alumni
découvre le fonctionnement des politiques publiques qui la passionnent. « J’aimais bien évidemment
l’objectif d’intérêt général auquel elles répondent et qui m’est cher, mais aussi le fait de réaliser de la
gestion de projet de grande ampleur avec, contrairement au privé, un nombre important de leviers de
coordination entre différents acteurs qui engendrent une mobilisation certaine » analyse Charlotte tout en
regrettant le manque de budget.


Son expérience humanitaire et d’actions de solidarité à la Croix-Rouge française, couplée à son
expérience en politiques publiques, la conduisent ensuite vers une nouvelle mission. De 2015 à 2020,
Charlotte travaille en effet pour l’élue en charge des solidarités et de l’accueil des personnes réfugiées
auprès de la maire de Paris, Dominique Versini. En tant que cheffe de cabinet, elle conseille et
accompagne l’élue dans la lutte contre la grande exclusion, qui regroupe l’accès à l’hébergement, le
soutien aux personnes les plus vulnérables et bien sûr le soutien aux personnes réfugiées qui à cette
époque-là arrivent malheureusement en grand nombre de Syrie et d’Afghanistan.


L’aboutissement


En 2020, à la suite des élections municipales, Charlotte a deux choix : embrayer sur une nouvelle mission
en cabinet ou alors rejoindre un poste de management dans une association de solidarité parisienne. Mais
aucune des deux options ne l’attire. « Mes précédents postes avaient tous été des coups de foudre
professionnels, mais là, il n’y avait pas d’évidence » avoue la quarantenaire qui refuse de se résigner. Elle
prend alors une décision difficile mais ô combien courageuse, car ne faisant pas toujours l’unanimité : elle
se retire de la vie professionnelle pour prendre le temps de trouver le projet qui l’anime. Après quelques
mois de réflexion, l’évidence est là : il lui faut créer sa propre entreprise de l’économie sociale et
solidaire. « Je ne voulais plus être prescriptrice, je ne voulais plus coordonner ou financer, je voulais « faire », je voulais tout créer moi-même en adéquation avec mes envies et mes convictions » explique
Charlotte.


A l’image de ses précédentes expériences, cette nouvelle mission regroupe toutes les compétences de
Charlotte mais aussi ses appétences. Elle décide d’aider les personnes réfugiées, dont elle connaît bien les
problématiques, et plus précisément les femmes car l’autonomie de ces dernières est un véritable enjeu de
société. Elle choisit également la cuisine comme support puisqu’elle se sent très à l’aise dans ce domaine
qu’elle maîtrise et qu’elle apprécie. Et c’est ainsi, en 2021, que naît Bande de Cheffes, une entreprise
solidaire d’utilité sociale (ESUS) qui propose un service de traiteur avec des plats cuisinés par des cheffes
réfugiées.


Bande de Cheffes

L’ADN de Bande de Cheffes est double. L’entreprise a pour finalité un objectif social : permettre à des femmes exilées d’accéder à la vie professionnelle et donc à l’autonomie. Le projet de Charlotte se veut être un tremplin pour ces cuisinières qui pourront ensuite si elles le souhaitent travailler pour un ou une cheffe renommé(e) ou même ouvrir leur propre restaurant. Cet ADN est aussi composé d’un engagement environnemental très fort, qui importe beaucoup à notre alumni : proposer une cuisine avec des produits locaux, de saison, issus de l’agriculture biologique et majoritairement végétariens.

Les déchets sont triés, les invendus redistribués, les déplacements effectués avec des véhicules électriques et le plastique à usage unique quasiment réduit à néant. « Tout ceci n’est pas évident à conjuguer avec des recettes du monde entier, d’autant que nos cheffes viennent de pays qui utilisent souvent beaucoup de viande et de féculents.
Mais nous nous amusons beaucoup à discuter de leurs recettes, les adapter, et aussi à chercher des
contenants végétaux pour présenter nos mets comme des citrons ou des endives ! » raconte Charlotte, le
sourire aux lèvres.


Les clients de Bande de Cheffes sont majoritairement des entreprises qui organisent des grands
événements sur mesure et de qualité (séminaires, cocktails, etc.), et qui souhaitent partager des valeurs
sociales et environnementales. « C’est assez incroyable car nous avons très peu prospecté, les premiers
contrats ayant apporté les suivants ! » s’étonne la quarantenaire qui constate une véritable appétence pour
le concept et l’offre culinaire. Actuellement, cinq cheffes couvrent le carnet de commandes mais Charlotte
souhaite recruter une personne qui la secondera pour la coordination de la production. Elle pourra ainsi se
consacrer à la structuration de l’entreprise, la communication et la prospection, ce qui lui permettra de
cibler davantage les clients. Bande de Cheffes a également pour projet de développer des ateliers de
cuisine, en premier lieu avec leur partenaire, l’association Emmaüs Solidarité, afin de donner envie aux
personnes accueillies dans les centres d’hébergement de cuisiner leurs propres repas avec des produits de
saison. Nul doute que Charlotte saura prouver qu’une entreprise peut être rentable, vivre de sa propre
activité sans subvention ou donation, tout en étant vertueuse au niveau social et environnemental !